Le Midi Libre – Par Sophie GUIRAUD
A Pollestres dans les Pyrénées-Orientales, une famille saisit la justice contre Sanofi. La mère avait pris de la Depakine pendant sa grossesse.
Après le Médiator et les pilules contraceptives, un anti-épileptique commercialisé par Sanofi, la Depakine, sera-t-il au cur du futur scandale sanitaire ? A Pollestres (Pyrénées-Orientales), Marine Martin nen doute pas. Pour elle, Nathan, 11 ans, est une victime de ce médicament prescrit pour soigner son épilepsie à elle, y compris pendant sa grossesse. Ses doutes, apparus au fil du développement de lenfant, ont été confirmés par un généticien qui, en 2009, fait le lien entre « les difficultés de Nathan » et le « traitement par Depakine pendant la grossesse ».
Nathan s’accroche à l’école
« A lâge de marcher, Nathan ne marchait pas. A lâge de parler, il ne parlait pas. A 2 ans, des troubles de langage et du comportement ont été diagnostiqués. Il a la chance davoir été très accompagné. Aujourdhui, il saccroche à son CM1″, raconte la jeune femme, lancée avec son mari dans le parcours du combattant des parents qui veulent comprendre, jusquà jeter une bouteille à la mer sur internet. Quatre mots sur le clavier : médicaments dangereux pour la grossesse.
La notice Sanfi invite à la prudence
Le site du centre de recherche sur les agents tératogènes de lhôpital parisien Armand Trousseau leur ouvre les yeux. Pour une future mère sous Depakine, le risque de malformation de lembryon y est estimé « de 4 à 5 fois la fréquence de base », plus de risques de trouble du comportement, de soutien scolaire et dorthophonie. La notice actuelle du médicament de Sanofi invite dailleurs à la prudence : « Ce médicament peut être responsable danomalies chez lenfant à naître. »
70 familles
Il nen était rien avant 2002″, accuse Marine Martin, qui regrette de navoir été alertée par aucun médecin « alors que des études alarmantes étaient sorties dès le début des années 80 ». Après labattement, la colère, la culpabilité, la révolte passe par un combat, une association « Apesac », née en 2011. Elle rassemble soixante-dix familles et une centaine denfants. Pas assez pour Marine Martin, qui se lance dans la bataille judiciaire pour « sauver dautres enfants ». A Tours, il y a quelques années, une famille sy est déjà cassé les dents. « Cétait avant le Médiator », rappelle Marine Martin, prête « pour un combat de dix ans ». Dautant que le principe actif de la Depakine, le valproate de sodium, est aussi prescrit aux personnes bipolaires…
Une victime indemnisée aux Etats-Unis
Les choses bougent aussi à létranger. En Belgique, 2 500 victimes sont recensées. En Grande-Bretagne, 17 500 bébés et 600 familles seraient concernés. Aux Etats-Unis, une victime vient dêtre indemnisée… « Marine, cest la figure de proue. Derrière, il faut travailler », glisse Lou, une autre maman de lassociation, en Rhône-Alpes, « révoltée » du silence qui entoure cette maladie sans nom : on parle de syndrome de lanticonvulsivant. Marine Martin est confiante : « Je gagnerai, forcément. »