Bonjour Florence, quelle est votre histoire ?
Je suis épileptique depuis l’âge d’un an. J’ai eu plusieurs traitements jusqu’à l’âge de 10 ans ou le neurologue m’a mis sous Dépakine chrono 500 mg 2 comprimés par jour.
A 16 ans mon neurologue m’annonce que je ne pourrai jamais avoir d’enfant sans aucune autre explication. Je décidais alors de me rendre à L’hôpital de la Timone à Marseille ou le spécialiste m’a confirmé que la grossesse était possible mais que je ne pourrais pas allaiter.
Avant de pouvoir mener ma première grossesse à terme, j’ai fait 8 fausses couches à 4-5 mois de grossesse. Jamais aucun médecin n’a fait le lien avec ma prise de Dépakine.
Comment s’est passé votre première grossesse?
Je suis tombée enceinte alors que j’étais encore sous pilule contraceptive comme pour toutes mes grossesses. Mon gynécologue ne m’a jamais dit que certaines pilules n’étaient pas compatible avec la Dépakine. La grossesse s’est passée de manière idyllique, malgré le stress de faire une nouvelle fausse couche. J’étais suivie tous les mois par un échographe. Mon garçon est né en 2002. C’était un bébé plutôt calme. Il souffre de problèmes d’audition et a une perte d’audition de 40 % ce qui a entraîné deux opérations durant son enfance. Il est aujourd’hui scolarisé au lycée, c’est un bon élève. Je suis donc tombée enceinte en 2006 sans aucune inquiétude car tout allait bien chez mon aîné.
Comment s’est déroulée votre deuxième grossesse?
J’ai du rester allitée pendant toute ma grossesse. Le col était ouvert et j’avais beaucoup de contractions. Lors de l’accouchement au bout de 17h d’attente, on m’a fait une césarienne. J’ai senti rapidement que ma fille avait un souci, elle ne faisait que pleurer. Elle ne babillait pas à l’age d’un an. Quand j’en parlais aux médecins, on me culpabilisait. A 2 ans et demi, le diagnostic tombe: troubles autistiques, puis sévère dysphasie et déficience intellectuelle. Elle est aujourd’hui scolarisée en IME. Mais toujours aucune information sur le lien entre les problème de ma fille et la prise de Dépakine pendant la grossesse.
Comment avez vous découvert le lien entre les problèmes de vos enfants et la prise de Dépakine?
J’ai connu l’association grâce aux réseaux sociaux. L’APESAC m’apporte les réponses aux questions que je me suis posée pendant des années.
Que vous arrive-t-il en 2018 à l’âge de 43 ans?
Suite à quelques problème de santé, je suis obligée de faire une prise de sang et là on m’annonce que je suis enceinte. Je n’y croyais pas. J’avais fait un déni de grossesse à 43 ans, cela ne me semblait pas possible. Au vu des problèmes de ma fille, je ne voulais pas le garder. Après un rendez-vous au planning familial, on m’annonce que j’étais enceinte de 20 semaines, il était trop tard pour avorter. On m’a conseillé d’aller en Espagne mais mon fils de 16 ans m’a conseillé de le garder et m’a dit qu’il serait là pour m’aider, cela m’a bouleversé.
Comment a réagi le papa ?
Dés qu’il a su que j’étais enceinte, il est parti, il m’a quitté. Il avait déjà deux enfants d’un premier mariage et ne voulait pas d’un 3ème. A ce jour , je n’ai plus aucune nouvelle.
Comment a réagi votre neurologue?
L’échographe m’a pris rendez-vous en urgence avec mon neurologue. Cela a été un choc pour lui, la possibilité que je puisse tomber enceinte à 43 ans sous contraceptif était tout simplement impossible.Il n’avait d’ailleurs pas jugé bon de me faire signer le protocole d’accord mis en place depuis 2015 pour me prescrire la Dépakine. Ca a été panique à bord et dans l’urgence en moins d’un mois il m’a passée sous KEPPRA, un autre antiéplieptique alors que d’habitude ce genre de changement se fait sur 6 mois, mais là la grossesse était l’urgence absolue. Il m’a également fait signer le protocole à posteriori pour se protéger.
Comment vous sentez-vous depuis que vous êtes sous Keppra?
Beaucoup mieux, avec la Dépakine, j’avais entre 1 et 5 crises par mois. Avec le Keppra je suis stabilisée, je ne fais plus de crises depuis 3 mois.
Comment arriviez-vous à avoir de la Dépakine, sans protocole?
Ma pharmacie me connaissait alors on me délivrait le médicament sans que je ne présente aucun document.
Comment ont réagi les médecins de l’hôpital?
C’était la panique totale. J’ai eu examen sur examen, je me rendais tous les 15 jours à la Timone, le grand hôpital de Marseille pour faire des échographies, prises de sang, examens cardiaques. On m’a fait toutes sortes d’examens que je n’avais jamais eu pour les deux premiers.
Comment s’est terminée votre grossesse ?
Louna est née il y a 15 jours, c’est une enfant calme. La sage femme et la puéricultrice me stressent car trop prévenantes, sans cesse sur le bébé. Je dois retourner en consultation en neuropédiatrie à la Timone dans deux mois pour le suivi de ma fille.
Sans le travail et le combat de Marine Martin, je n’aurais pas eu cet important suivi dont j’ai bénéficié pendant ma dernière grossesse et dont bénéficiera Louna pendant les premières années de sa vie.
Propos recueillis par Nathalie orti