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PARIS, 7 novembre 2025 (APMnews) – L’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac) plaide pour une évolution du dispositif prévu au sein de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) pour prendre en compte les enfants ayant développé des troubles neurodéveloppementaux (TND) liés au traitement par valproate de leur père, a-t-on appris vendredi auprès de sa présidente, Marine Martin, et de son avocat, Charles Joseph-Oudin.
Le groupement d’intérêt scientifique (GIS) Epi-Phare de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) a publié, jeudi, les résultats d’une étude confirmant que les enfants dont le père a été exposé à l’anti-épileptique valproate et ses dérivés (dont Dépakine*, Sanofi) pendant la spermatogenèse présentent un risque accru de développer des TND (cf dépêche du 06/11/2025 à 17:04).
Ces données doivent être transmises au comité d’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne du médicament (EMA) alors qu’une étude danoise publiée fin mai a conclu à un risque faible de TND avec l’exposition paternelle au valproate pendant la conception (cf dépêche du 28/05/2025 à 14:26 et dépêche du 11/07/2025 à 16:06).
L’Apesac a reçu dès 2016 les premiers témoignages de pères, s’interrogeant sur l’origine des troubles de leur(s) enfants alors qu’ils suivaient un traitement anti-épileptique par valproate mais pas la mère, et plaidé dans ce sens auprès de l’EMA dès 2017 (cf dépêche du 26/09/2017 à 19:15), ce qui a conduit à lancer des études (cf dépêche du 24/04/2019 à 18:26). De nouveaux témoignages ont afflué lorsque l’ANSM a informé les professionnels de santé à l’été 2023 sur la base d’une étude européenne (cf dépêche du 04/08/2023 à 11:18 et dépêche du 17/05/2023 à 11:11), rapporte Marine Martin.
« Nous avons aujourd’hui près de 80 cas de ‘papas Dépakine*’ et on s’attend à de nouveaux appels avec la nouvelle étude », poursuit-elle. L’avocat de l’association prépare actuellement une dizaine de dossiers pour lancer une procédure judiciaire car cette situation n’est pas prévue dans le dispositif Oniam.
La présidente de l’Apesac souligne qu’en raison de cette problématique, elle a eu l’occasion de « demander que le dispositif ne soit pas fermé » auprès des représentants du gouvernement présents lors du dernier conseil d’orientation de l’Oniam, en mai, mais aussi auprès de la mission de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), qui l’a auditionnée dans le cadre de son analyse du contrat d’objectifs et de performance de l’Oniam pour 2021-2024.
Dans ce rapport datant de juillet 2024 mais publié seulement la semaine dernière, l’Igas a notamment recommandé à l’Oniam de « réexaminer, avec la tutelle, les voies de simplifications et réviser les moyens humains nécessaires pour finaliser l’indemnisation des victimes et de leurs proches dans les délais attendus et dans le respect des règles de la gestion publique, dans l’hypothèse de nouvelles demandes d’indemnisation amiable en nombre concernant le valproate ».
Alors que l’Oniam estimait que « le principal de l’activité d’indemnisation suite aux avis du collège devrait
s’épuiser à la fin de l’année 2025 », la mission a considéré qu’il restait une incertitude « réelle » et « forte » sur l’ampleur de cette activité à venir au-delà de 2025, davantage en raison d' »une charge de travail par dossier particulièrement lourde » qu’un contentieux massif en nombre de demandes.
« Il est donc important de travailler avec les parties prenantes pour éclairer la réalité des demandes à venir », a observé l’Igas.
Réformer l’Oniam dans le cadre du PLFSS
L’avocat de l’Apesac souhaite « initier une discussion avec le ministère de la santé sur la manière de réformer l’Oniam dans le cadre du prochain PLFSS » alors que l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 a débuté, mardi, en première lecture à l’Assemblée nationale et doit s’achever dimanche, avec un vote solennel mercredi 12 novembre.
« Aujourd’hui, l’Oniam n’est pas prévu pour les enfants dont les troubles sont liés à une exposition au valproate par le père et l’extension est du ressort de la loi. Il faudrait également réfléchir à la situation de la deuxième génération, c’est-à-dire des enfants dont les mères ont des troubles liés à l’exposition in utero pendant la grossesse de leur propre mère, ainsi qu’aux enfants exposés in utero à d’autres anti-épileptiques », dont il a été montré qu’ils présentaient également un risque.
Il manque également les enfants exposés in utero aux dérivés du valproate pris en traitement d’un trouble bipolaire, ajoute Me Joseph-Oudin.
De manière plus générale, il ne s’inquiète pas pour la pérennité du dispositif Oniam mais souligne la nécessité qu’il reprenne son travail, qui a été perturbé depuis le départ du président du collège d’experts l’été dernier mais qui doit en retrouver un nouveau « normalement dans les prochains jours », et améliore son fonctionnement.
« Les délais de traitement des dossiers s’allongent, avec des avis d’indemnisation du collège d’experts qui ont deux-trois ans, même cinq pour le plus ancien! On attend que l’Oniam se substitue à Sanofi (cf dépêche du 18/10/2024 à 15:01) ». En outre, même si un retard a été pris avec la mise à jour du référentiel de l’Oniam (cf dépêche du 04/07/2025 à 15:10), il existe un problème « structurel » lié à « une logique purement comptable ».
L’avocat souhaite que « les tutelles lui lâchent la bride pour qu’il puisse avancer » et accepter des dossiers avec des indemnisations à plusieurs centaines de milliers d’euros bloqués pour des frais minimes de photocopie, de poste ou d’indemnités kilométriques.
En 2024, l’indemnisation des victimes du valproate de sodium s’est élevée à 34 millions d’euros, avec un total de 91,8 M€ depuis l’entrée en vigueur du dispositif en juin 2017 (cf dépêche du 26/06/2025 à 11:38).

