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La Marcquoise Aouatef Souissi indemnisée au titre du scandale dit de la Dépakine

La Voix du Nord, le 09 Octobre 2020

La Marquoise Aouatef Souissi indemnisée au titre du scandale dit de la Dépakine

Les méfaits du Dépakote ont touché le fils d’Aouatef Souissi, Raphaël, mort à deux mois après avoir été empoisonné in utero par le valproate de sodium. Un collège d’experts est arrivé à ces conclusions et la Marcquoise de 47 ans vient d’accepter l’indemnisation qu’on lui a proposé : 30 000 € pour elle et 30 000 € pour son ancien compagnon.

Aouatef Souissi a perdu son fils Raphaël le 15 juin 2014. Grand prématuré, il est né avec un spina bifida, une malformation de la colonne vertébrale qui a rendu ses deux mois d’existence extrêmement douloureux, même si ses parents ont réussi à nouer un véritable dialogue avec lui (voir par ailleurs).

Quand elle a compris, après des recherches sur Internet, que le Dépakote pris pour soigner ses troubles bipolaires était à l’origine des handicaps de son enfant, Aouatef a déposé plainte contre Sanofi. Parallèlement à l’action collective de l’association Apesac. La Marcquoise visait aussi les praticiens qui la suivaient. « À aucun moment, ils ne m’ont dit quoi que ce soit à propos du Dépakote ». Ni son médecin traitant, ni sa gynécologue, ni sa psychiatre.

Or la molécule que contiennent Dépakote et Dépakine, le valproate de sodium, était déjà connue pour causer des ravages au fœtus. Ce qu’elle ignorait. « Je suis tombée enceinte sans le savoir, raconte Aouatef Souissi. Ma grossesse s’est mal passée ». À deux mois, elle a eu l’intuition de cesser son traitement, tout en s’informant. Elle en a alors parlé à sa psy. « Elle s’est excusée et m’a dit d’arrêter le Dépakote . Mais ces deux mois ont suffi à tout bousiller. ».

« Une conclusion »

En 2017, l’Assemblée nationale votait la constitution d’un Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam). « Les experts ont conclu à la responsabilité de mes médecins », se réjouit Aouatef. Et à celle de Sanofi, qui la nie. « Pour les experts, 80 % de ce qui est arrivé à Raphaël sont dus au valproate de sodium, 20 % au fait qu’il soit prématuré ». Ils ont également considéré que la Marcquoise avait subi des préjudices d’ordre professionnel, affectif et psychologique. Après le décès de Raphaël, Aouatef Souissi avait repris son travail en centre d’appels. Mais, notamment du fait d’une hypersensibilité aux sons, elle a dû cesser son activité ; elle est en invalidité.

Les autres préjudices sont évidents. La proposition d’indemnisation de l’Oniam est arrivée voilà quinze jours par courrier : 30 000 € pour elle, 30 000 € pour son ancien compagnon. « Je m’étais dit que quelle que soit la somme, j’allais accepter. Je me suis beaucoup battue, je suis fatiguée ». Elle a donc dit oui il y a une semaine.

Aouatef ne pourra jamais tourner la page, mais « c’est quand même une conclusion ; quand j’ai lu noir sur blanc que c’est l’exposition au valproate qui avait tué Raphaël, ça m’a fait du bien, même si je le savais ». Pour autant, elle n’a pas abandonné sa plainte contre Sanofi et elle s’est associée à la démarche de l’Apesac, dont elle est membre, en février, quand le laboratoire a été mis en examen.

Raphaël, deux mois de dialogue par le regard

En 2014, quand Aouatef Souissi vit une grossesse difficile et doit cesser le travail, elle part aux Baléares, où elle a longtemps vécu. Le 6 avril, elle accouche sous césarienne de Raphaël, dans une clinique spécialiste des grands prématurés, à Palma de Majorque. L’enfant pèse 715 g et souffre de spina bifida dans sa forme la plus grave. Cette malformation de la colonne vertébrale entraîne de multiples handicaps (paraplégie, incontinence urinaire et fécale…). Raphaël a besoin d’une assistance respiratoire.

« On est resté six semaines à Palma, chaque jour Raphaël faisait des progrès, confie Aouatef. On est rentré en France et, à Jeanne-de-Flandre, on nous a dit qu’il avait trop de malformations, qu’il ne pourrait pas avoir une vie digne. L’avis médical collégial était qu’il fallait arrêter l’assistance respiratoire. On a fini par accepter, la mort dans l’âme ». L’agonie dure 36 heures, avec dix arrêts cardiaques. Raphaël renonce après que sa maman lui murmure : « Tu peux partir en paix, on t’aime ».

Aznavour

Ces deux mois et une semaine passés avec Raphaël sont ineffaçables. « Son papa et moi, on est très reconnaissants d’avoir vécu ce moment-là. On arrivait à communiquer avec les yeux, il était très éveillé, je l’imitais… Tous les soirs, je lui racontais une histoire et je chantais. J’ai remarqué qu’il était sensible à Charles Aznavour… C’était une communication de peau à peau. »

 

Rapidement, Aouetef et son compagnon ont une fille, Léonor, 5 ans aujourd’hui. Son bonheur. Même si la Marcquoise de 47 ans ne cesse de s’angoisser pour elle. « Toutes les nuits, j’avais peur qu’elle meure. J’ai encore peur qu’elle ne se blesse, que les gens lui fassent du mal. C’est un syndrome de stress post-traumatique ».

 

 

par Christian Furling, Source La Voix du Nord

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