JSD
Cette jeune femme de 33 ans porte au quotidien le poids des effets de la prise de Dépakine par sa mère. Maman de trois enfants, eux aussi touchés par ce médicament, elle a décidé de témoigner pour faire toute la lumière sur son cas et surtout, dit-elle, pour informer toutes les familles qui ignorent tout des conséquences de la prise de cet antiépileptique. Rencontre avec une mère courage.
« Je suis une enfant Dépakine. Alors qu’elle était enceinte de moi en 1985, ma mère s’est vue prescrire ce médicament en raison de crises d’épilepsie qu’elle avait faites. Elle ignorait tout du danger que représentait cet antiépileptique qui pouvait atteindre le fœtus et provoquer de graves dommages. Avant moi, et avant que n’apparaissent ces crises d’épilepsie, elle a mis au monde trois enfants, mes trois sœurs qui n’ont aucun problème de santé. On m’a raconté qu’à ma naissance, j’étais cyanosée et que présentant un état de manque, on m’aurait injecté un médicament pour me sevrer.
Toute petite, j’étais fragile et souvent malade. À 4 ans, j’ai eu ma première greffe de tympan. Aucun lien n’a été fait alors par les différents médecins avec la prise de Dépakine. En 2015, âgée de 29 ans, je fais un malaise cardiaque et suis mise en arrêt maladie. La même année, en regardant dans l’émission Sept à huit le témoignage de Laurence Blanchard, je comprends enfin ! Après vingt ans de prise de Dépakine, celle-ci a enfin compris pourquoi ses trois enfants étaient gravement malades. J’ai tout de suite fait le lien entre la prise de Dépakine de ma mère et mon état. Tout s’est alors enchaîné très vite. Je contacte l’Apesac.
Aujourd’hui, je souffre de troubles du rythme cardiaque et fais des malaises à répétition. Je suis très fatiguée. Je suis atteinte d’une dysmorphie faciale au niveau du maxillaire inférieur et ai été reconnue malentendante à 50 %. J’ai refusé d’être appareillée, je me suis habituée à mon état, je verrai plus tard, dans quelques années.
LIRE AUSSI : Les parents-Depakine dénoncent un scandale sanitaire
Maman de trois enfants
Les trois enfants que j’ai eus, avant 2015, c’est-à-dire avant de prendre connaissance des effets de la Dépakine, ont tous les trois des problèmes de santé. Mon plus grand (14 ans) est atteint de scoliose avec inégalité de longueur de jambes. Petit, il était malade et a subi des opérations pour des hernies inguinales. S’il est très réservé, il bénéficie comme sa sœur et son petit frère d’une précocité intellectuelle. Tous les trois ont des problèmes de motricité fine. Et en raison de dyspraxie et de dysgraphie avec des difficultés de concentration, ils sont accompagnés chacun en classe d’une AVS.
Se battre pour ses droits
Aujourd’hui, j’ai été mise, à 33 ans, en invalidité totale, après avoir enchaîné trois ans d’arrêts maladie depuis 2015. Si, j’ai appris à vivre avec ce que j’ai, je veux faire valoir mes droits et ceux de mes enfants. Je me bats avec l’association pour la reconnaissance de notre statut de victimes de la Dépakine. Mais la constitution du dossier est plus que complexe : on me réclame des documents de 1985, l’année où ma mère a commencé à prendre de la Dépakine. Je n’ai pas ces documents. Les premiers que je possède datent de 1987 : ils attestent que ma mère a pris ce médicament depuis 1985. C’est un peu compliqué…
Déléguée départementale de la Seine-Saint-Denis de l’Apesac, je me bats pour informer les familles mais aussi les médecins et toutes les structures comme les PMI, car il y a potentiellement énormément de victimes dans notre département. »
Propos recueillis par Claude Bardavid
Source ; JSD