Dans un livre, Marine Martin dénonce la négligence des médecins, de l’industrie phamaceutique et des pouvoirs publics concernant l’information sur les effets de cet antiépileptique, qui aurait fait au moins 14.000 victimes.
Elle est celle par qui le scandale arrive. Elle est l’emmerdeuse, l’empêcheuse de tourner en rond. La dénonciatrice, l’accusatrice, la pourfendeuse… Grande gueule, même pas médecin.
Pourtant, même maintenant qu’elle est «célèbre», elle ne se voit pas comme cela. Elle ne savait pas qu’elle avait cela en elle. C’est avant tout une mère qui défend ses enfants à qui on a fait du mal et par la même occasion défend d’autres mères, d’autres familles. C’est ce que Marine Martin, 44 ans, raconte dans Dépakine, le scandale. Sept années de combat qui vont conduire cette éducatrice de l’Éducation nationale, mère de deux enfants, que rien ne prédisposait avec un nom si commun, une vie du côté de Perpignan dans les Pyrénées-Orientales si «normale», à se révolter et à prendre la tête d’un combat titanesque.
«Médicaments», «dangereux» et «grossesse»… des mots qui vont faire voler sa vie en éclats
Marine Martin est traitée pour une épilepsie depuis qu’elle a 10 ans. Deux fois par jour, tous les jours de l’année, elle avale des pilules. Cela ne l’empêche en rien de se marier. Ce n’est pas qu’elle a un caractère inquiet, mais elle est prudente et avec tous les médecins qu’elle voit, elle pose toujours la question de son épilepsie et de son traitement. «Ne vous inquiétez pas…» La réponse devenue antienne berce ses consultations. Comme toute mère aussi, elle est très attentive à ses enfants, à leurs comportements. Contrairement à Salomé, l’aînée, Nathan est un bébé difficile, puis un petit garçon manifestement en retard pour parler, marcher… La vie de la famille est compliquée, stressante, anxiogène… Internet est une source d’informations, sur l’autisme par exemple ou sur tout autre moyen d’identifier les troubles de Nathan. Ce sont les mots «médicaments», «dangereux» et «grossesse» qui vont faire voler en éclats sa vie. «Un jour de l’automne 2009, je les ai tapés les uns à la suite des autres sur Internet. C’était un après-midi magnifique (…). La maison était vide, les enfants étaient à l’école (…). En une fraction de seconde, le monde s’est effondré. Il a suffi d’un clic.» La jeune mère comprend qu’on lui a menti: sciemment, par incompétence, par cupidité? Pourtant, tout est là, tout est connu, tout est décrit concernant les risques de la prise de l’antiépileptique pendant la grossesse. Après l’incrédulité, le désespoir, vient la colère. Et c’est début 2011 que vient le temps de l’action. Marine Martin raconte très bien et dans des détails touchants ces années avec ses hauts et ses bas, ses défaites et ses victoires, pour déplacer des montagnes.
Elle rêve alors parfois d’être Élise Lucet ou le Dr Irène Frachon, la médecin du Mediator. Elle rêvait que le scandale de la Dépakine sorte dans le journal Le Monde. C’est Le Figaro, comme pour le Mediator, qui portera cette histoire au grand jour. Le résultat est extraordinaire: l’information sur les dangers de la Dépakine chez la femme enceinte est largement diffusée, les conditions de prescription ont changé, le ministère a été secoué tout comme l’industrie pharmaceutique et un fonds d’indemnisation des victimes sera bientôt opérationnel. Sacré Marine…
Dépakine, le scandale Marine Martin, Éd. Robert Laffont. 240 p. , 19,50 €.
Source : http://sante.lefigaro.fr/article/scandale-de-la-depakine-les-annees-de-combat-d-une-epileptique