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Dépakine : un dispositif ad hoc pour sécuriser l’indemnisation

Par SOLVEIG GODELUCK – Le 08/03 à 11:54

Le gouvernement a décidé de créer un collège d’experts et un comité d’indemnisation indépendants. L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux est très critiqué pour son manque de générosité et de rapidité.

A scandale extraordinaire, dispositif extraordinaire. Pour indemniser les victimes de la Dépakine, ce médicament qui a entraîné des malformations et des retards de développement chez des bébés à naître , le gouvernement a décidé de créer un collège d’experts et un comité d’indemnisation indépendants. Ils seront certes adossés à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), qui mettra à leur disposition des moyens techniques et humains. Mais eux seuls diront qui a droit à des réparations, à quelle hauteur. Une enveloppe de 10 millions d’euros a déjà été allouée pour 2017.

L’instauration de ce dispositif ad hoc rassure Charles-Joseph Oudin, avocat des victimes de la Dépakine : « Dans l’affaire du Mediator, on a pour la première fois créé un collège d’experts indépendants présidé par une magistrate, ce qui a permis d’avoir une procédure d’indemnisation fonctionnant raisonnablement », rappelle-t-il. L’avocat n’a pas confiance en l’Oniam : « Je leur reproche de ne plus avoir à l’esprit qu’ils sont là pour indemniser. Il y a un orgueil à ne pas dépenser. »

L’Oniam a déçu

L’Office a été créé en 2002 afin d’offrir une réparation à l’amiable aux victimes, même s’il n’y a pas de faute de la part du laboratoire pharmaceutique. Une vraie avancée par rapport à la protection offerte par les tribunaux. D’autant plus que les délais de traitement devaient être plus courts qu’une procédure judiciaire. Mais l’Oniam a déçu. La Cour des comptes s’est montrée sévère dans son rapport public du mois dernier, appelant à une « remise en ordre impérative ». Dans la foulée, le directeur général a été congédié et remplacé par Sébastien Leloup.

« L’établissement intervient comme un assureur qui s’attacherait à limiter sa charge de sinistre », accusait la Cour des comptes. L’Oniam est censé délier les cordons de la bourse à la demande des commissions de conciliation et d’indemnisation (CCI). Ces dernières examinent la recevabilité des dossiers de victimes, désignent des experts, puis transmettent sous six mois leur avis en vue d’indemniser – à l’assureur quand il y a faute, ou à l’Oniam en l’absence de faute.

Les délais s’allongent

Mais l’Office « s’est investi dans un réexamen systématique de tous les avis, coûteux en personnel et en temps, secret et non contradictoire ». Chaque année, il consacre 800.000 euros à son service médical, qui n’est pas prévu par la loi. Il s’est attribué le pouvoir de réformer les avis des CCI « en vertu d’une expertise juridique et médicale que la loi ne lui avait pas confiée », déplorait la Cour.

Résultat, les délais s’allongent, avec une année de stock à traiter en 2015. Alors que l’Oniam a quatre mois pour indemniser, il faut deux ans et neuf mois pour aboutir à une réparation intégrale, contre neuf ans devant les tribunaux administratifs. Le montant moyen de l’indemnisation baisse, à 85.927 euros. Ce dispositif « n’apparaît pas plus avantageux aujourd’hui pour la victime que le droit commun », cinglait la Cour.

Par conséquent, alors que le législateur avait estimé à 10.000 le nombre de bénéficiaires potentiels du dispositif chaque année, il y en a moins de 4.500 par an. Les demandes ont diminué de 3,6 % en 2015 et 17 % des décisions de l’Oniam sont contestées devant les tribunaux. In fine, près de la moitié des indemnisations réglées par l’Oniam résultent d’une décision de justice.

@Solwii

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