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Scandale de la Dépakine : pour elles, rien ne sera jamais fini

le republicain lorrain 

I l n’existe pas de chiffres précis. Des études évoquent 10 000 enfants nés en France ces vingt-cinq dernières années avec des malformations et handicaps. D’autres observateurs craignent plus de 50 000 victimes. En Moselle, une vingtaine de familles se sont rapprochées de l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac). Son nom est apparu au cœur du printemps, en même temps que celui du médicament à l’origine de leur mal, la Dépakine.

 

Une vingtaine de cas en Moselle, cela ne correspond sans doute pas à l’ampleur du scandale. « Certains parents préfèrent ne pas en parler », observe Nathalie, installée à Hagondange. « Ou alors elles ne connaissent encore pas le problème et n’ont pas fait le lien avec les difficultés de leur enfant. C’est possible aussi. » Son mari et elle sont restés dans l’ignorance pendant plus de quinze ans. « C’est ce qu’il y a de pire… Penser que d’autres traversent ce qu’on a connu, ça me peine. »

 

Son histoire est celle de milliers de mamans. Épileptique, Nathalie a été traitée avec de la Dépakine, un traitement ultra-efficace. Mais aussi ultra-nocif pour le fœtus. Son garçon est né avec différents troubles. Chaque enfant développe ses propres handicaps, souvent, des signes autistiques. Mais chez ces enfants, certaines réalités ne trompent pas : ils parlent et marchent tard, souffrent d’otites à répétition, sont maladroits, colériques. Physiquement, il est troublant de voir ces bébés se ressembler autant, avec leur nez empâté et leur lèvre supérieure plus fine.

 

Marie-Hélène et Pascal ont beaucoup souffert de ne pas comprendre les maux de leur fille Romane, 12 ans aujourd’hui. « A l’âge de deux mois, elle faisait souvent des convulsions », racontent ces Fameckois. « Elle devait être shootée par des médicaments. Le corps médical lui a même donné de la Dépakine… »

 Comme les autres parents, ils ont cherché l’origine du problème. Des tests génétiques ont été réalisés. Les médecins n’avaient pas d’autres réponses que celle-ci : « Elle est en retard. »

 Ils se retrouvent à gérer un enfant pas comme les autres. Une jolie petite puce souriante qui éprouve les pires difficultés à travailler à l’école. Les devoirs sont un calvaire. Trois heures chaque soir. « Je voyais bien que ce n’était pas qu’un problème de retard », soupire son papa. Elle a du mal à comprendre les choses, elle a besoin de plus de temps. »

 

Pour les familles, l’apprentissage de la vie est un combat « au quotidien », assure Nathalie, qui a arrêté de travailler pour s’occuper de Théo, âgé de 17 ans (lire ci-dessous). Une épreuve pour l’enfant mais aussi pour les parents vis-à-vis du monde qui les entoure. Ils sont apparus, longtemps, comme « de mauvais parents parce qu’on ne savait éduquer notre progéniture. C’est dur de ne pas être compris. On se démène seul. Si vous saviez les réflexions d’enseignants… C’est épuisant », assurent Marie-Hélène et Pascal. Leur vie et leur couple ont pris une claque. « C’est beaucoup de stress, de pression, de souci. » L’impossibilité aussi de faire un autre enfant. « On ne pouvait pas prendre le risque. Sans savoir de quoi il s’agissait en plus… », confie Marie-Hélène. « Quelque part, notre famille est incomplète. »

 Il a fallu que le scandale de la Dépakine éclate médiatiquement pour que tout s’éclaire. Et que le regard des autres change. « Cela nous a fait un choc mais au moins, maintenant on comprend. Et les autres aussi. Il y a plus de bienveillance. Beaucoup de compassion. Et l’Apesac nous apporte son soutien. » Le dossier de Romane est en cours d’analyse. Elle saura bientôt, comme pour Théo, si la médecine la reconnaît « enfant Dépakine ». Une étape obligatoire pour prétendre, par exemple, à l’indemnisation promise cet été par la ministre de la Santé. « Ce sont des promesses qui tombent dans un contexte politique particulier… » et qui ne régleront pas tout, de toute façon. « Nous avons surtout besoin d’accompagnement. Ces enfants ont besoin d’aide, de soins, d’assistance. Cela coûte cher. Il faut qu’ils aient accès à ces soins. » Comme une assurance pour l’avenir encore incertain de ces enfants peu indépendants.

 « L’avenir de ma fille, j’y pense tous les jours », assure Pascal, les yeux troublés par l’émotion. « Est-ce qu’elle pourra travailler ? Est-ce qu’elle trouvera un mari pour bien s’occuper d’elle ? Oui, j’y réfléchis tout le temps… » Sa femme aussi. Avec un pincement au cœur : « Quand je pense que j’ai empoisonné ma fille en me soignant… »

 L’argent promis par la ministre de la Santé aidera et soulagera certains maux. Mais il ne réglera pas tous les problèmes quotidiens des milliers de familles Dépakine, qui se démènent pour aider leurs enfants handicapés à grandir le mieux possible. Ou comment la prise de cet antiépileptique a chamboulé des existences.

 « De mauvais parents incapables d’élever leur enfant… »

 

Source: le républicain lorrain 

 

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