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Creuse : Faustine, vie brisée d’un bébé Dépakine

La montagne 

Sa maman cherche à savoir pourquoi Sanofi, les médecins, l’État ont tu les risques de ce médicament pour les femmes enceintes. 49 ans que la Dépakine® circule et dans son sillage, des drames et un scandale. L’antiépileptique aurait fait plus de 50.000 victimes in utero.

 Epileptique, Angèle Podetti, habitante de Bellegarde-en-Marche (Creuse) a été sous Dépakine® pendant des années. Sa fille aînée, Faustine est atteinte du syndrome de l’anticonvulsivant. Et sa maman, depuis, cherche à comprendre.  

 49 ans que la Dépakine® circule et dans son sillage, des drames et un scandale. L’antiépileptique aurait fait plus de 50.000 victimes in utero.

 «Je veux comprendre. Je veux que Sanofi nous explique pourquoi ils nous ont caché volontairement ces informations qui étaient essentielle ? Si on m’avait dit les risques que je prenais à avoir Faustine, honnêtement, je ne l’aurais pas eue. » Faustine, aujourd’hui 13 ans, est un bébé Dépakine®. Sa mère, Angèle, épileptique, était sous traitement depuis son adolescence. « En 2002, quand mon mari et moi avons eu un désir d’enfant, nous avons consulté. Sur les notices de Dépakine®, il était écrit : “En cas de grossesse, prévenez votre médecin”. On a vu le généraliste, le neurologue, le gynécologue, les trois ont dit que continuer le traitement pendant ma grossesse ne posait pas de souci, qu’un arrêt du traitement entraîne à 90 % des cas de récidive et qu’il devait donc être poursuivi, bien que l’on sache que ce médicament “augmente légèrement le risque de spina bifida”… C’est tout. »

 L’omerta générale

 Ce que l’on saura plus tard, c’est que ces malformations et troubles neuro-comportementaux sont dus à la molécule du valproate qui empêche la fermeture du tube neural au 24e jour de grossesse. Commercialisé depuis 1967, les effets secondaires de l’anti-consulsivant commencent pourtant à être connus dès 1982. Dans les années 1990, des risques d’autisme sont signalés. Mais toujours rien sur les notices, toujours aucune contre-indication des médecins, pas un mot de l’Agence de santé, ni de Sanofi.

 Faustine est l’un des 2.426 enfants en France atteints d’une embryofœtopathie au valproate de sodium, syndrome de l’anti-convulsivant. Angèle a dû arrêter de travailler pour pouvoir s’occuper d’elle et le quotidien est une véritable épreuve. « Ma fille a un QI de 70, elle n’est pas propre, elle fait des crises d’épilepsie, peut vomir jusqu’à 8 fois par nuit sans que l’on sache pourquoi… Elle ne comprend pas ce qu’on lui dit, n’a aucune conscience du danger, ne gère pas la frustration et se sent sans arrêt agressée, tape… Elle a passé des centaines d’examens, personne n’a su nous dire ce qu’elle avait, son dossier médical est épais comme ça… ». 

 Épais comme le désarroi de ces familles, de ces femmes à qui les médecins n’ont rien dit et qui ont continué leur traitement de Dépakine®, sans savoir les conséquences dramatiques qu’il avait sur leur fœtus… « Est-ce que vous pensez vraiment que si on nous avez avertis des risques, on aurait eu nos enfants ? », lâche Angèle. Désormais secrétaire et déléguée régionale pour le Limousin et le Centre de l’Apesac (association des parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anti-convulsivant), elle se bat pour savoir et que le laboratoire Sanofi, les médecins, l’État, prennent leurs responsabilités.

 Le 25 août dernier, le diagnostic du Dr Lemonnier, spécialiste de l’autisme, confirme l’intuition d’Angèle depuis des années : « Diagnostic d’autisme suite à la prise de la Dépakine® par la maman durant la grossesse. » 30.000 autres femmes ont pris ce médicament et ont eu des enfants. L’Apesac estime entre 50 et 70.000 les victimes potentielles. « On demandait simplement qu’on nous avertisse des risques. C’était à nous de décider. J’aurais aimé avoir le choix. Il existe 14 autres médicaments antiépileptiques, j’aurais pu en essayer un autre. S’il avait fallu rester couchée pendant 9 mois pour ne pas faire de crise et avoir ma fille, pourquoi pas, et si vraiment ça n’avait pas été possible, je ne l’aurais pas eue. Mais j’aurais eu le choix. Parce que quelle vie elle a ? ».

 « J’ai empoisonné mon enfant sans  le savoir quand d’autres savaient… »

 Angèle a « jeté » son traitement en 2006 et a eu deux autres filles dix ans après sa première grossesse. « Elles vont très bien mais je ne suis pas sereine. Il faut savoir que le valproate modifie l’enveloppe du gène chez les fœtus, ça veut dire que même si votre enfant va bien, rien ne dit que ses enfants ne seront pas handicapés… On a eu le cas. La grand-mère prenait de la Dépakine®, les filles n’ont rien et une petite-fille a de gros soucis… ». L’inconséquence médicale a eu et continue d’avoir des conséquences dramatiques pour des milliers de familles comme celle d’Angèle. « Ce n’est pas quelque chose de simple à dire : J’ai empoisonné mon enfant sans le savoir quand d’autres savaient. Cette culpabilité, je la porterai à vie… »

 Sanofi, médecins, État, à qui la faute?? 

  « J’ai lu l’interview d’un neurologue de la Pitié Salpêtrière. Il dit clairement qu’il a toujours su et que si les femmes ne le savaient pas, c’est qu’elles n’allaient pas voir le bon médecin. » Une explication qui révolte Angèle Podetti, qui nous confie que souvent, des femmes ont vu leur traitement doublé quand elles tombaient enceintes, « pour être sûr qu’elles ne fassent pas de crise ».

 Les médecins, l’Agence santé savaient-ils?? Si oui, pourquoi n’ont-ils rien dit?? Un des trois médecins qui l’ont suivie pendant sa grossesse – aujourd’hui à la retraite –, assigné à comparaître au tribunal de Grande instance de Bobigny, l’a appelée récemment pour lui dire, « que ce serait comme le Médiator et compagnie, que dans quelque temps, on n’en parlerait plus… ». 

 Le médicament est toujours en circulation et le laboratoire rejette la faute sur l’État. L’Apesac a lancé une procédure judiciaire. « On cherche à comprendre pourquoi on nous a caché la vérité. » 

  L’association travaille pour que les notices soient modifiées et qu’un logo apparaisse sur les boîtes avec l’intitulé : « Dépakine®, Dépakote®, Dépamide® : danger pour les filles et femmes en âge de procréer. » Elle travaille également sur une campagne d’indemnisation des victimes. « On a eu des promesses pour l’instant. Marine Martin, présidente nationale de l’Apesac rencontre régulièrement la ministre de la Santé, Marisol Touraine pour discuter de cela ».

 

Des centres de diagnostic doivent voir le jour d’ici la fin de l’année et un protocole national de diagnostic et de soins doit être mis en place. Les familles de l’Apesac attendent également une expertise médicale. Les experts ont été nommés, « ils diront si la Dépakine® est vraiment en lien avec le handicap de Faustine ».

 

Source: la montagne 

 

 

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