L’Express, le 10 novembre 2020
L’ANSM indique qu’elle « répondra à toute interrogation de la justice afin d’apporter sa pleine et entière contribution à la manifestation de la vérité ».
Après Sanofi, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de Santé (ANSM) a annoncé lundi avoir été mise en examen pour « blessures et homicides involontaires par négligence » dans l’affaire de la commercialisation de l’anti-épileptique Dépakine. Cette déclaration fait suite à une convocation devant les juges en charge de l’instruction, précise l’agence dans un communiqué.
L’ANSM affirme prendre « toute la mesure de la souffrance des victimes et oeuvre depuis plusieurs années afin de limiter l’exposition au valproate des femmes en âge d’avoir des enfants ». Elle « répondra à toute interrogation de la justice afin d’apporter sa pleine et entière contribution à la manifestation de la vérité ».
Enquête ouverte en 2016
L’enquête avait été ouverte en 2016 auprès du tribunal judiciaire de Paris, suite à une procédure à l’initiative de l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anti-convulsivant (Apesac), représentant 4000 personnes dont la moitié des enfants malades, et qui s’appuyait sur 14 cas de mères ayant reçu de la Dépakine lors de leur grossesse.
La molécule en cause, le valproate de sodium, est commercialisée depuis 1967 sous la marque Dépakine par Sanofi, mais aussi sous des marques génériques, et est prescrite aux personnes souffrant de troubles bipolaires. Elle présente néanmoins un risque élevé de malformations congénitales sur le foetus si elle est prise par une femme enceinte.
Un procès pas avant « quatre ou cinq ans »
Cette mise en examen « ne me surprend pas, c’est dans la droite ligne de la condamnation de l’Etat par le tribunal administratif de Montreuil » en juillet, qui a condamné l’Etat à indemniser des familles d’enfants lourdement handicapés, a réagi Marine Martin, présidente de l’Apesac.
« J’espère que cela va permettre à l’Etat de ne pas chipoter et d’indemniser correctement les victimes de la Dépakine », a-t-elle ajouté, soulignant que les indemnisations proposées actuellement étaient « dérisoires » alors que les victimes présentent des « troubles autistiques extrêmement graves et que leur prise en charge est onéreuse ». Selon Charles Joseph-Oudin, avocat de l’association, « on s’oriente vers un grand procès Dépakine », même si celui-ci ne pourra pas se tenir « avant quatre ou cinq ans », ce qui constitue un « temps très long pour les familles ».
Une cinquantaine de parties civiles
Dans ce dossier, plus d’une cinquantaine de parties civiles sont constituées, selon l’avocat. Des expertises doivent désormais être réalisées pour établir un lien entre l’exposition in utero à la Dépakine et les pathologies des victimes. Le nombre d’enfants handicapés à cause du valproate de sodium est estimé entre 15 000 et 30 000, selon les études.
Source : L’Express avec AFP