L’Indépendant
Le laboratoire pharmaceutique, dont la responsabilité dans le scandale de la Dépakine, cet antiépileptique terratogène pourtant prescrit à des femmes enceintes, a été reconnue par les tribunaux, refuse d’indemniser les victimes. C’est donc l’État, aussi condamné, qui, pour l’heure, va assumer seul les indemnisations. Autrement dit, le contribuable.
Scandales en cascade autour de la Dépakine. L’anti-convulsivant fabriqué par le géant pharmaceutique français Sanofi, a été prescrit à des femmes enceintes alors qu’il s’est avéré terratogène. Et a même continué à l’être une fois la notice enfin complétée par un avertissment sur le sujet. Ce scandale, qui laisse handicapés (malformations, troubles autistiques, retards psychomoteurs…) des milliers d’enfants en France, a éclaté en 2011 grâce à une habitante des Pyrénées-Orientales, Marine Martin. Maman de deux enfants victimes du valproate de sodium (le principe actif du médicament) devenue lanceuse d’alerte, elle a fondé l’Apesac, l’association qui informe, regroupe et soutient quelque 6 500 familles dont 633 en Occitanie (81 dans les P.-O.) et 145 décès recensés. Aujourd’hui, l’association de la Catalane est mobilisée pour que Sanofi assume sa responsabilité dans ce scandale sanitaire; équivalent à ceux du Mediator et du Levothyrox.
« Chez Sanofi, ils sont abjects, comme d’habitude »
« Sanofi refuse de payer alors que la justice l’y a obligé !, s’insurge Marine Martin. Ils sont abjects, comme d’habitude, ils ne changent pas. Ils rendent responsables l’Etat au lieu d’assumer leur part de responsabilité, en l’occurence 70 %, comme dans le scandale du Mediator« . La lanceuse d’alerte qui insiste aussi sur les autres responsables du scandale de la Dépakine : l’Etat et les médecins. Ces derniers ont pour beaucoup continué, et continuent, à prescrire du valproate de sodium à des femmes épileptiques enceintes ou en âge de l’être, alors que les notices stipulent, depuis 2006, le danger de pareilles precriptions pour l’enfant à naître. « C’est incompréhensible,répète Marine Martin. J’espère que ces médecins seront condamnés ». Une centaine de plaintes courent au civil contre des médecins généralistes et des gynécologues.
Silence radio au labo
Sollicité à plusieurs reprises depuis le mois de février, sur des points précis, le laboratoire Sanofi garde le silence. Pour toute réponse, son service « relations média » nous a adressés le communiqué de presse largement diffusé le 16 janvier dernier, et déjà en notre possession, qui conteste « le dispositif d’indemnisation mis en place ». Le laboratoire y affirme que celui-ci « ne prend pas en compte les preuves établissant que Sanofi a informé les autorités sur les données disponibles(et) a demandé la modification des documentations sur le valproate de sodium il y a plus de 30 ans pour le risque de malformation et à partir de 2003 pour le risque neuro-développemental (…) re
« Les risques étaient connus mais le principe de précaution n’a pas été appliqué »
Mais selon maître Joseph-Oudin, avocat de l’association des victimes, pour qui « dans ce dossier, il y a clairement deux responsables principaux : le labo et les autorités de santé, puis les médecins », ces demandes de modification de Sanofi « sont trompeuses« . « Bien avant celles-ci, la littérature scientifique et de pharmacovigilance pointaient des cas démontrant que la Dépakine présentait des risques pour le foetus. Et on n’a pas appliqué le principe de précaution, insiste l’avocat.
« Ce n’est pas un problème d’argent mais de principe »
Enfin, maître Joseph-Oudin commente sévèrement le refus de Sanofi d’indemniser les victimes de la Dépakine. « Le partage de responsabilité laboratoire-Etat est acté et c’est pas parce qu’on est deux qu’on est moins responsable, dit-il. Aujourd’
Rejets toxiques autour de l’usine
Le site Sanofi Chimie de Mourenx, près de Pau, qui produit la Dépakine, rejette du valproate de sodium (son principe actif) dans l’air. À au moins deux reprises récemment, la dernière fois en septembre 2018, l’usine s’est ainsi trouvée en non-conformité et a dû stopper son activité. Les salariés ont subi des tests qui se sont révélés positifs au valproate de sodium, présent dans leur organisme. Riverains, associations environnementales et Apesac ont déposé plainte.