Le Figaro
Le gouvernement propose un amendement pour la création d’un fonds d’indemnisation pour les victimes de la Dépakine. Il ressemble à celui concernant le Mediator, mais amélioré.
Finalement, Sanofi mettra bien la main au portefeuille. Après moult discussions avec le ministère de la Santé, le laboratoire fera partie du fonds d’indemnisation des victimes de son médicament, la Dépakine. Entre la Santé et Bercy, c’est finalement Bercy qui a gagné en voulant faire payer l’industriel.
Fin septembre, après un an d’enquête préliminaire, le parquet de Paris ouvrait une information judiciaire à propos de la Dépakine, cet antiépileptique commercialisé en France depuis 1967 et accusé d’entraîner des malformations chez le fœtus ainsi que des troubles comportementaux chez l’enfant quand il est pris par les femmes enceintes. L’enquête est ouverte pour «tromperie aggravée et blessures involontaires» et porte sur la période de 1990 à avril 2015. Voilà pour le volet judiciaire. Restait l’indemnisation des victimes, ces familles dont l’enfant est parfois lourdement handicapé au point d’avoir besoin d’une aide à domicile et d’un soutien à l’école, ou dont les difficultés sont telles que l’un des parents a dû s’arrêter de travailler. Les effets délétères sur le fœtus ne concernent pas exclusivement les malformations physiques, puisque la Dépakine peut aussi être responsable de troubles autistiques.
Modification du code de la santé publique
Le gouvernement a donc proposé lundi soir un amendement s’inscrivant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2017. Le texte doit être voté dans la nuit de mardi à mercredi. Ce fonds était absent de la première mouture du texte présenté en Conseil des ministres ainsi que du menu des débats au sein de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Finalement, le texte prévoit une modification du code de la santé publique et l’insertion d’un nouvel article intervenant après celui concernant l’indemnisation des victimes du Mediator. L’amendement II-1131 est intitulé «Indemnisation des victimes de valproate de sodium ou de ses dérivés».
«Un mécanisme protecteur pour les victimes»
Comme pour le Mediator, le fonds sera adossé à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Un collège d’experts sera créé et aura en charge de trancher l’imputabilité des dommages liés au médicament. Si tel est le cas, le dossier partira dans un comité d’indemnisation, toujours lié à l’Oniam et chargé de faire un chiffrage des dommages. Par rapport au Mediator, les délais ont été raccourcis: quand le collège d’expert a rendu son avis, Servier a trois mois pour faire une proposition, faute de quoi l’Oniam a trois mois pour se substituer à l’industriel. Pour la Dépakine, ce sera un mois.
«Le mécanisme proposé par le gouvernement est protecteur des droits des victimes de la Dépakine et doit permettre une indemnisation intégrale de leur préjudice, explique maître Charles Joseph-Oudin, avocat de l’Association d’Aide aux Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anticonvulsivant (Apesac). Il est important que le Laboratoire Sanofi, qui est le principal responsable de ce scandale de santé publique majeur, assume enfin ses responsabilités».
Interrogé par Le Figaro, Sanofi indique qu’il «ne partage pas l’analyse du mécanisme telle que rapportée par certains médias et rappelle que le texte ne préjuge en rien des responsabilités qui pourraient être imputées aux différents acteurs.»
Le fonds devrait être mis en place au printemps prochain.
Anne Jouan Source : Le Figaro