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L’avis d’une lanceuse d’alerte

Nous deux

En 2007, au CHU de Brest, de nombreux cas d’atteintes cardiaques inexpliquées attirent l’attention de la pneumologue Irène Frachon . Ses recherches mettent en cause le Mediator, un coupe-faim des laboratoires Servier .

Il y a près de 20 ans, vous deveniez lanceuse d’alerte sur les dangers du Mediator. Où en est ton combat ?

En 2021, les laboratoires Servier ont été reconnus coupables de « tromperie aggravée » et d’« homicides et blessures involontaires », et en décembre 2023, ils ont été condamnés plus lourdement en appel. On attend le jugement de la Cour de cassation , bien sûr, pour confirmer cela. Mais le jugement est tellement bien motivé que j’ai du mal à imaginer que cela pourrait changer quelque chose. Pendant ce temps, le combat continue pour les victimes. Il y a un certain nombre d’entre elles qui ne sont toujours pas indemnisées. D’autres souffrances de pathologies qui s’aggravent et meurent…

Comment devient-on lanceuse d’alerte ?

C’est vraiment la vie qui décide, ce n’est pas une vocation ! Après, il faut avoir une tempérament adéquat pour porter ce genre de combat. C’est-à-dire qu’il faut être un tout petit peu énervé, un tout petit peu obstinée. Comme je le raconte dans une bande dessinée parue récemment, dans mon cas, c’est vraiment un événement qui a percuté mon existence. J’avais deux solutions, comme quand on est témoin d’un crime : détourner la tête en faisant le strict minimum, ce que malheureusement ont fait un certain nombre de mes collègues, ou alors décider d’aller jusqu’au bout de ce combat…

Vous vous doutez que ce serait à ce point difficile ?

Oui, il faut quand même le dire. Dans cette affaire, je pensais que le corps médical, du fait de sa vocation, aurait évidemment à cœur, très rapidement, de protéger les victimes de ce crime industriel. C’est pour moi la leçon la plus amère de cette affaire.

Vous connaissez bien Emmanuelle Huet-Mignaton, aussi ?

Elle fait partie des lanceuses d’alerte, comme Marine Martin dans l’affaire de laDépakine, avec qui j’ai noué des privilèges privilégiés. J’ai été sollicité par beaucoup de lanceurs d’alerte ces dernières années. En général, je donne peu suite parce que je n’ai pas le temps ou parce que je ne suis pas compétent. Je rencontre des lanceurs d’alerte dont le combat m’intéresse, comme Sophie Rollet, qui est une lanceuse d’alerte dans l’affaire des pneumatiques Goodyear. Le point commun avec le Mediator, c’est ce qu’on appelle la « délinquance en col blanc ». C’est la criminalité économique dont le moteur est l’argent.

Que pouvez-vous nous dire du combat d’Emmanuelle ?

Je me sens proche d’elle parce que, techniquement, je comprends bien son combat. Et je l’apprécie beaucoup, elle est devenue une amie. Ce qui me frappe chez elle, c’est à la fois sa détermination et une très, très grande colère. Il faut comprendre qu’elle a été touchée dans sa chaise, comme Marine Martin. Cette colère est ravageuse parce qu’elle se rappelle à ces femmes en permanence. Ces deux lanceuses d’alerte présagent une révolte mais elles ont aussi su s’organiser et de se donner les moyens de leurs combats.

Emmanuelle se bat pour elle et pour les autres ?

Oui, parce qu’il devient insupportable de réaliser que d’autres femmes comme elle ont été ou vont encore être exposées. Ce combat, c’est de la sororité aussi.

Source: Celine Jury

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