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La Dépakine fait trembler Sanofi

L’Actu Labo

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Le jugement rendu le 5 janvier par la 7e section de la prestigieuse première chambre civile du tribunal judiciaire de Paris dans l’affaire de la Dépakine – du nom de cet antiépileptique commercialisé depuis 1967 – a ébranlé les certitudes, et une certaine morgue, des dirigeants de Sanofi qui s’attendaient sans doute à un bien meilleur sort.

Les juges ont, en effet, reconnu sans ambages la responsabilité de la big pharma dans les multiples cas de malformation congénitale (coeur, reins, doigts, visage) et de troubles du développement neurologique (retards cognitifs, trouble du spectre de l’autisme) qu’ont subi les enfants des femmes auxquelles ce traitement avait été prescrit durant leur grossesse.

Statuant dans le cadre d’une action de groupe intentée en 2017 par l’Apesac, une association de victimes présidée par la lanceuse d’alerte Marine Martin, le tribunal a estimé à l’issue d’un long argumentaire émaillé de références scientifiques que Sanofi avait bien commis « une faute en manquant à son obligation de vigilance et à son obligation d’information ». Il a notamment considéré que les malformations et les troubles neurodéveloppementaux provoqués par le valproate de sodium « étaient régulièrement mentionnés dans la littérature médicale à partir de 1984 » en ce qui concerne les risques de malformation ; et depuis 2001 en ce qui concerne les troubles du développement. Pourtant, ce n’est qu’en 2006 que Sanofi a consenti à déconseiller dans la notice de la Dépakine son administration aux femmes enceintes « C’est bien sûr une étape majeure dans la reconnaissance d’une défaillance majeure de Sanofi. Tous les arguments qu’ont pu avancer ses défenseurs ont été balayés », se félicite Charles Joseph-Oudin, avocat associé au cabinet Dante Avocats, principal conseil de l’Apesac. Certes, Sanofi ne devrait pas manquer de faire appel de cette décision, « mais ce jugement porte tout de même un rude coup à l’attitude de déni et de mépris à l’égard des victimes observée depuis le début de cette affaire », poursuit Charles Joseph-Oudin qui appelle les dirigeants de Sanofi à engager des discussions sur les conditions d’indemnisation, sans attendre l’issue du procès d’appel qui devrait se tenir dans un délai de dix-huit à vingt-quatre mois. Les enjeux financiers sont de première importance. Selon le conseil de l’Apesac, le nombre de dossiers d’indemnisation préconstitués par le cabinet s’élève déjà à près de 700, « et environ 1 400 sont en cours de finalisation, nous précise Charles Joseph-Oudin. Au total, le nombre de dossiers pourrait s’établir entre 3 000 et 4 000. Ils ne seront d’ailleurs pas tous portés par Dante Avocats. » Il est à noter que 3 000 demandes ont déjà été reçues à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM). Cet organisme a déjà indemnisé 800 victimes pour un montant de 28,5 M€ au titre de la responsabilité de l’État qui a été reconnue en juillet 2020 » « Les dommages provoqués sont plus sévères que ceux causés par le Mediator. À titre d’exemple, la cour d’appel d’Orléans, statuant dans le cadre d’un dossier individuel, avait estimé le préjudice à 3 M€. Même si on ramène l’indemnisation moyenne à 1,5 M€, l’addition risque d’être salée pour Sanofi », prévient Charles Joseph-Oudin. Il n’est toutefois pas sûr que Sanofi rende aussi facilement les armes. La chambre de l’instruction a, en effet, exigé du juge qu’il diligente une seconde expertise sur le médicament. La première avait conduit l’autorité judiciaire à prononcer la mise en examen du laboratoire. Les jeux sont encore ouverts

 

Jean-Christophe Savattier

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