France bleu
La famille Orti, à Misson, près de Pouillon, vient de porter plainte contre X dans l’affaire de la Dépakine. Les parents se battent depuis des années pour faire reconnaître les responsabilités du laboratoire Sanofi dans le retard de développement de leur enfant.
Nathalie et Christian Orti, les parents d’Esteban, aujourd’hui âgé de 13 ans, se battent depuis des années pour que le laboratoire pharmaceutique Sanofi reconnaisse ses responsabilités dans le scandale de la Dépakine. La maman a pris cet anti-épileptique lorsqu’elle était enceinte. Leur fils, Esteban, souffre de graves retards de développement. L’an dernier, une expertise judiciaire a démontré que la Dépakine était directement responsable de l’état d’Esteban. La famille qui habite Misson, près de Pouillon, a donc décidé de porter plainte contre X pour administration de substance nuisible, atteinte à l’intégrité de la personne, tromperie aggravée, non signalement d’effet indésirable ou encore mise en danger de la vie d’autrui.
France Bleu Gascogne : Vous venez de déposer plainte contre X dans cette affaire de la Dépakine. C’est une nouvelle étape importante dans votre long combat judiciaire ?
Nathalie Orti : Oui. Nous venons de déposer plainte parce que nous avons des expertises qui ont déjà fait le lien entre la Dépakine et les problèmes de mon fils. Donc, ça nous a semblé légitime de déposer plainte. C’est vrai qu’il y a actuellement un procès Mediator et je rêve, un jour, d’un procès Dépakine. On a déposé plainte également parce qu’on est vraiment en colère. Dans la loi de financement de la sécurité sociale votée en novembre, le législateur a inscrit dans la loi que l’ONIAM (Office national d’indemnisation des accidents médicaux) prend en compte les malformations depuis 1982 et les troubles neuro-développementaux depuis 1984, ce qui veut dire que Sanofi et l’État savaient et qu’ils ont laissé faire pendant au moins 30 ans. C’est révoltant. Notre vie est gâchée. Nous, on a pris « perpète » pour s’occuper de notre enfant handicapé et eux, ils ne se sentent pas responsables.
Vous portez plainte contre X, vous ne portez pas plainte directement contre Sanofi, pourquoi ?
On porte plainte contre X parce que justement les juges d’instruction vont pouvoir étudier notre histoire et établir les responsabilités. Dans ce dossier, il y a bien sûr Sanofi, mais il y a aussi l’État, les médecins… Sanofi est quand même cité 21 fois dans notre plainte donc même si elle n’est pas directement dirigée contre le laboratoire, il est clairement visé. Actuellement, Sanofi ne reconnaît rien, dit qu’il n’est pas responsable, que ce n’est pas son problème. Il ne participe pas au fonds d’indemnisation. Aujourd’hui, c’est l’État qui prend la place de Sanofi pour payer. Donc c’est le contribuable, c’est nous, qui allons nous auto-indemniser. C’est quand même aberrant.
Cette plainte, c’est la première plainte au pénal que vous déposez dans ce dossier. Cela fait déjà des années que vous vous battez pour votre fils, Esteban. Vous êtes conscients que le combat va encore prendre de longues années ?
Oui, on sait que ça va être très long. Cette plainte va déjà donner lieu à une convocation à la gendarmerie. On va être entendu effectivement. On sait que l’on a des années de combat long et difficile à mener, mais il faut qu’on le fasse. Il faut qu’on le fasse pour notre enfant, pour notre histoire, pour aller jusqu’au bout des choses. On ne sera jamais libéré, comme je le disais, on a pris « perpète ». C’est un combat à vie. Mais au moins, on sera allé au bout de tout ce qu’on a pu faire pour notre enfant.
La famille Orti est membre de l’Apesac, association qui soutient les familles de victimes
Source : France bleu, Marion Dambielle-Arribagé