Elle
10 000 femmes enceintes ont pris ce médicament entre 2007 et 2014, alors que les risques sur le fœtus étaient connus. La lanceuse d’alerte témoigne.
Malformations, troubles du développement, autisme… Les risques sur le fœtus, liés à la prise de l’anti-épileptique Dépakine, étaient connus depuis des années de Sanofi. Sans Marine Martin, présidente de l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anti-convulsivant (Apesac), les femmes l’ignoreraient encore.
« AUCUN MÉDECIN NE M’AVAIT ALERTÉE »
« Ma fille est née en 1999, mon fils, en 2002. Avec une malformation. Il a eu du mal à se tenir assis, à marcher, à parler. On a diagnostiqué des troubles de la relation et du langage. J’ai repensé à un article sur les malformations dans les familles d’agriculteurs, à cause de pesticides. Je n’y ai pas été exposée, mais je prenais un médicament anti-épileptique, la Dépakine. J’ai tapé dans Google « médicament et grossesse ». Le deuxième le plus dangereux était la Dépakine. Dans la description des symptômes, j’ai reconnu ceux de mon fils. J’étais effondrée. Aucun médecin ne m’avait alertée. Depuis 1994, des études montrent que la Dépakine rend les enfants autistes, mais on a continué à la prescrire pendant vingt ans. Sanofi a tout verrouillé. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM*) n’a obligé le laboratoire à indiquer les risques sur les notices qu’en 2015. Et cela parce que nous avons demandé, avec l’Apesac, et une association anglaise, à l’Agence européenne du médicament une réévaluation. L’ANSM a dû s’aligner. Avec les 1 500 familles de l’association, on se soutient, mais on bricole. Le ministère de la Santé propose huit centres de référence, mais nous ne voulons pas de médecins ayant des conflits d’intérêt avec Sanofi, qui conteste toute responsabilité. L’État propose un fonds d’indemnisation, mais il est hors de question qu’il soit financé par nos impôts et non par Sanofi. »
* Une étude de l’ANSM est à paraître.
Source :Elle