Lille Actus
Cet antiépiletpique très efficace s’avère dangereux pour les fœtus. Rencontre avec Peggy Kolacinski, maman de Lauryne, qui espère bénéficier du fonds d’indemnisation.
Elle a tout enfoui pendant des années. Mais depuis mars, elle a décidé de parler. Peggy Kolacinski est passée de la douleur à la colère. À 42 ans, cette maman de trois enfants souffre d’épilepsie et prend de la Dépakine®, un médicament qui s’avère très efficace pour elle. Sa maladie s’est déclarée en 1998, elle avait déjà un enfant, Quentin.
En 2000, alors qu’elle est déjà enceinte, c’est son neurologue qui lui lance : « Mais c’est dangereux ! Avec la Dépakine®, votre enfant peut avoir un Spina Bifida ! (un développement incomplet de la colonne vertébrale du fœtus ndlr) » Lorsqu’elle retourne consulter son médecin traitant, celui-ci ne trouve rien dans son Vidal, le dictionnaire qui regroupe les caractéristiques des médicaments.
Car si la Dépakine® est un antiépileptique très efficace, il présente des risques pour le fœtus : les bébés nés de mères ayant pris de l’acide valproïque contenu dans ce médicament ont 10 % de risques de présenter des malformations et 30 à 40 % de risques de présenter des retards de développement et de souffrir d’autisme. L’ensemble de ces risques étaient connus à la fin des années 1990 mais il a fallu attendre 2006 pour que la Dépakine® soit déconseillée en cas de grossesse.
Et une nouvelle étude publiée le 24 août par l’Agence nationale de sécurité du médicament a révélé qu’entre 2007 et 2014, plus de 14 000 femmes enceintes y ont encore été exposées.
Quel avenir pour Lauryne ?
En décembre 2000, lorsque Lauryne naît, le pire semble avoir été évité. Mais à six mois, la fille de Peggy Kolacinski ne parvient pas à s’asseoir toute seule. Il faudra attendre ses 2 ans et demi pour qu’elle marche au prix d’une méthode très dure.
Certains mouvements de la main sont difficiles pour elle, par exemple pour ouvrir une bouteille d’eau. Âgée de 16 ans, Lauryne a été scolarisée dans des établissements spécialisés. Ses parents ont dû lui acheter des semelles et des chaussures orthopédiques, refaire la salle de bains de leur maison de Fenain parce qu’enjamber la baignoire était impossible pour leur fille. Cette dernière voulait devenir toiletteuse pour animaux, impossible. Ses parents rendent la Dépakine® responsable de ses problèmes.
Et pour Peggy Kolacinski, c’est le laboratoire Sanofi, qui commercialise le médicament, qui n’a pas « fait ce qu’il fallait ».
Merci Sanofi d’avoir brisé notre vie ! Ma fille n’arrive pas à communiquer avec des filles de son âge, elle a du mal à gérer ses colères, elle devra sans doute travailler en ESAT, s’il y a de place, elle ne pourra peut-être pas avoir son propre logement.
Avant de concevoir un nouvel enfant, son médecin traitant a mis en place un traitement de substitution. Océane, aujourd’hui âgée de 12 ans, ne présente pas de maladie mais elle commence à rencontrer des difficultés scolaires. Le sort n’a pas épargné la famille Kolacinski car Quentin est en bac pro bâtiment menuiserie en Ulis (une classe pour élèves présentant des difficultés d’apprentissage).
La famille est suivie par un centre médico-psychologique. « Ce n’est pas évident. Je dois travailler à temps partiel », explique celle qui est aide à domicile. Peggy Kolacinski travaille essentiellement le week-end pour pouvoir avoir du temps en semaine afin de ne pas laisser sa fille seule et de se rendre à tous les rendez-vous médicaux et scolaires. Son mari, lui, travaille la semaine. Un rythme épuisant alors que la fatigue, le stress et l’angoisse peuvent déclencher des crises d’épilepsie.
Il y a trois ans, Peggy Kolacinski a découvert l’Apesac (association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant) sur internet. Elle a pu rencontrer d’autres mamans, se sentir moins isolée. En juin, l’association comptait 76 familles membres dans le Nord - Pas-de-Calais. Elle accompagne les familles qui souhaitent aller en justice.
Suite à l’annonce par Marisol Touraine du vote d’un dispositif d’indemnisation au Parlement d’ici fin 2016, Peggy Kolacinski espère pouvoir en bénéficier.
Lauryne en a besoin pour pouvoir s’en sortir, pour avoir une meilleure prise en charge.
Contact : Apesac au 01 76 54 01 34 ou contact@apesac.org, la page Facebook de l’association.
Source : Lille actus