Sciences et Avenir
Depuis des années, le professeur Yehezkel Ben-Ari, chercheur à l’INSERM et membre du conseil médico-scientifique de l’APESAC, rend des souris autistes en leur injectant du valproate de sodium ! Vous trouverez ci-dessous l’article paru dans la revue Sciences et Avenir du 07 février 2014 relatant les travaux du Pr Ben-Ari et du Dr Lemonnier, membre lui-aussi de notre conseil médico-scientifique, et validés par la communauté scientifique internationale.
AUTISME. Un nouveau cap vient d’être franchi dans la compréhension de l’autisme. La communauté scientifique s’accorde désormais sur l’origine précoce de l’apparition de la maladie. Probablement au stade fœtal et/ou postnatal de l’individu touché.
Une équipe de chercheurs dirigée par le Dr Lemonnier (Brest) et Yehezkel Ben-Ari, directeur de recherche émérite à l’Inserm, a publié une étude parue dans la revue Science datée du 7 février. Elle met en évidence le rôle clé que joue le chlore dans les mécanismes qui déclenchent la maladie.
CHLORE et OCYTOCINE. En temps normal, les neurones présentent des taux élevés de chlore durant la phase embryonnaire. Cela permet au principal médiateur chimique du cerveau – le GABA – d’exciter les neurones afin de faciliter la construction du cerveau. À la naissance, une baisse naturelle du taux de chlore transforme le rôle du GABA. Il se change en inhibiteur de neurones afin de réguler l’activité du cerveau adolescent/adulte.
L’étude montre que c’est un dysfonctionnement dans ce processus qui serait à l’origine de l’autisme.
L’hormone de l’accouchement impliquée
En effet, la baisse du taux de chlore qui permet le développement des neurones est en principe provoquée par l’hormone dite de l’accouchement : l’ocytocine. Les résultats des expériences menées sur des souris montrent que c’est un déficit d’ocytocine qui empêche la baisse de ce taux de chlore pendant la naissance. C’est ce dysfonctionnement qui serait à l’origine de l’expression du syndrome autistique.
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Les chercheurs ont utilisé deux modèles animaux d’autisme. Le premier est génétique, il s’agit du syndrome de l’X Fragile qui est la mutation la plus fréquente liée à l’autisme. L’autre, produit par l’injection à la rate gestante de Valproate de sodium – un produit connu pour générer des malformations et notamment un syndrome autistique chez les enfants. Des rongeurs sains étant utilisés pour effectuer la comparaison.
Les taux de chlore pendant l’accouchement sont déterminants dans l’apparition du syndrome autistique
Ainsi, les chercheurs ont enregistré pour la première fois l’activité des neurones au stade embryonnaire et juste après la naissance afin d’observer les modifications des taux de chlore.
Fait particulièrement impressionnant, la chute naturelle du taux de chlore qui a eu lieu au moment de la naissance chez les animaux contrôles était inexistante dans les 2 modèles animaux atteints d’autisme. Chez ces derniers, les neurones avaient donc le même taux de chlore à l’état embryonnaire et après la naissance.
« Les taux de chlore pendant l’accouchement sont déterminants dans l’apparition du syndrome autistique », explique Yehezkel Ben-Ari. Et dépendent en partie de la sécrétion de l’hormone de l’accouchement.
Ces données valident notre stratégie thérapeutique
Plusieurs études avaient déjà montré des niveaux de chlore anormalement élevés dans de nombreuses pathologies cérébrales (épilepsies infantiles, trauma crânien…). À partir de différentes observations, l’équipe du Dr Lemonnier et de Yehezkel Ben-Ari avait effectué un essai clinique en 2012 en émettant l’hypothèse de taux de chlore élevés dans les neurones de patients autistes.
Une hypothèse validée
Les chercheurs avaient montré que l’administration à des enfants autistes d’un diurétique (qui réduit les taux de chlore dans les neurones) avait des effets bénéfiques. Les résultats concluants de l’essai allaient dans le sens de cette hypothèse mais la démonstration de taux de chlore élevés dans les neurones autistes manquait pour établir le mécanisme proposé et justifier le traitement. C’est désormais chose faite.
« Ces données valident notre stratégie thérapeutique et suggèrent que l’ocytocine agissant sur les taux de chlore pendant la naissance module ou contrôle l’expression du syndrome autistique » affirme Yehezkel Ben-Ari. Et de conclure : « pour traiter ce type de maladies, il faut comprendre comment le cerveau se développe et comment les mutations génétiques et les agressions environnementales modulent les activités du cerveau in utéro »