Témoignage : Stéphanie – J’ai pris du Lamictal pendant ma grossesse et une de mes filles est autiste
Bonjour Stéphanie, quelle est votre histoire ?
A l’âge de 18 ans, au lycée, j’ai fait ma première crise. On m’a alors envoyé vers un neurologue qui a diagnostiqué des micro absences et m’a proposé du lamictal matin et soir. Ce médicament me convenait parfaitement car j’étais stabilisée.
A 20 ans j’ai rencontré mon mari et rapidement nous avons souhaité avoir des enfants. Je suis tombée enceinte à 22 ans. Dès que je l’ai su, je me rappelle parfaitement avoir appelé mon neurologue pour lui demander si ce traitement était compatible avec la grossesse. Il m’a répondu que celui-ci était fait exprès pour les femmes enceintes.
Que s’est-il passé ensuite?
J’étais rassurée, ma grossesse s’est bien déroulée. Je n’ai pas été plus surveillée que la normale. A la naissance de ma première fille, nous avons remarqué que l’arrière de sa tête était plat et déformé. A 4 mois je l’ai emmené chez un ostéopathe qui m’a dit de ne pas m’inquiéter, que cela allait revenir à la normale mais cela ne s’est jamais remis. Aujourd’hui à 6 ans, elle a une compression du cerveau qui occasionne des problèmes de vue et de mâchoire. Elle était aussi très hypotonique étant petite, c’était un bébé calme. Elle a également des troubles psychomoteurs.
Avez vous souhaité d’autres enfants?
Oui, 3 ans après, je suis de nouveau enceinte toujours sous traitement. Ma grossesse se passe magnifiquement bien. Emma naît en bonne santé. A l’âge de 18 mois, nous observons qu’elle ne parle pas. Elle a une fascination pour tout ce qui tourne (machine à laver , roues de la poussette…). C’est là que je comprends que quelque chose ne va pas alors que mon entourage le nie. Je décide de prendre rendez-vous avec le CAMSP qui diagnostique un retard de langage. Un contrôle ophtalmologique en septembre dernier met en évidence une correction de lunettes sous évaluée. Les médecins nous disent alors que son retard est du à son trouble visuel. Depuis qu’elle a ses nouvelles lunettes, ses troubles sont amplifiés. Elle a des crises de colères, des tocs, des angoisses. Elle ne supporte pas le bruit. Elle a besoin de rituels qui doivent être immuables. Et il y a peu, le médecin nous a annoncé qu’ils pensent à un trouble du spectre autistique. Ils ne se mouillent pas, tout est oral, et j’essaye d’en savoir plus auprès du CRA qui me renvoie vers le CAMSP.
Comment avez vous fait le lien?
Par pur hasard, lors d’une réunion, je discute avec la maman d’une copine de classe de ma grande fille des difficultés d’Emma. Et là à ma surprise elle me demande : as-tu pris un médicament pendant ta grossesse ? Elle me présente à son amie Nathalie Pentecouteau qui fait partie de l’Apesac. Je tombe des nues, jamais je n’aurais imaginé. J’ai contacté l’association en mars et je suis tombée sur Marine Martin qui m’a écouté, a répondu à mes interrogations.
Que vous apporte l’Apesac?
Ca fait du bien de me dire que je ne suis plus toute seule. Ce que Marine fait, c’est extraordinaire. Malheureusement beaucoup d’enfants sont touchés et il faut se battre. Nous avons décidé d’aller jusqu’au bout pour défendre nos enfants différents. J’ai contacté le cabinet Dante et j’ai commencé à récupérer mes dossiers médicaux. Cela sera long mais je ne lâcherais rien.
Comment allez-vous?
J’ai arrêté tout traitement il y a deux ans, je n’ai pas revu mon neurologue pour lui parler de tout ça. Mon mari voudrait un 3ème enfant mais je ne veux pas même si je ne prends plus de traitement. Je veux me consacrer entièrement à mes deux filles pour les aider au maximum. Je culpabilise tellement d’avoir pris ce traitement.
Notre vie est chamboulée, tout tourne autour du handicap. J’ai beaucoup d’inquiétude sur l’avenir des mes filles. Je me pose beaucoup de questions, j’ai l’impression de tout porter sur mes épaules. Je leur en veux tellement de ne m’avoir rien dit, je suis déterminée à me battre coûte que coûte.
Propos recueillis par Nathalie Orti
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