Accusé de ne pas avoir informé les femmes enceintes des risques que présentait le médicament Dépakine pour la santé de leur bébé, le groupe Sanofi a annoncé le 3 février sa mise en examen.
C’était un médicament prescrit, entre autres, contre les troubles bipolaire et l’épilepsie, et commercialisé sous la marque Dépakine. Depuis 2016, Sanofi faisait l’objet d’une enquête pour « tromperie sur les risques inhérents à l’utilisation du produit et les précautions à prendre ayant eu pour conséquence de rendre son utilisation dangereuse pour la santé de l’être humain ». Le groupe n’aurait pas assez informé les femmes enceintes sur les risques de ce médicament.
Une molécule toxique
C’est la molécule valproate de sodium, présentant un risque élevé de malformation pour le fœtus, qui est à l’origine de ce scandale pharmaceutique. En effet, près de 4100 enfants sont concernés. Troubles neuro-développementaux, malformations physiques, des conséquences d’une gravité extrême pour des mères qui accusent le laboratoire de ne pas les avoir informé des risques que la prise de Dépakine faisait courir à leur enfant.
Rencontre avec une lanceuse d’alerte
Nous avons rencontré Marine Martin, maman de deux enfants handicapés. Elle prend de la Dépakine depuis des années pour soigner son épilepsie et estime n’avoir jamais été alertée de la toxicité possible de ce produit durant ses deux grossesses :
« Quand mon fils est né, il avait une malformation urogénitale, par la suite il ne tenait pas assis, à l’âge de marcher il ne marchait pas, à l’âge de parler il ne parlait pas. Quant à ma fille, on me disait à l’école qu’elle était un peu bizarre, qu’elle était dans la lune. Je suis tombée des nues quand j’ai découvert sur internet une littérature scientifique qui prouvait que ce médicament créait dans 10% des cas une malformation et dans 40% des cas de l’autisme. »
Ce n’est que depuis 2016 que les effets nocifs de la Dépakine sont reconnus, mais Marine Martin nous explique que le laboratoire les connaissait bien avant :
« Dès les années 1980, le laboratoire et le gouvernement ont reçu des signalements d’enfants devenus autistes suite à une exposition pendant la grossesse à la Dépakine. Tout le monde savait : les neurologues, les médecins savaient que la Dépakine ne devait pas être prescrite chez la femme enceinte et pourtant ce n’était pas indiqué dans la notice. »
La mise en examen du groupe, une première victoire pour les victimes
Le fait que l’enquête menée depuis 2016 aboutisse à une mise en examen permet aux personnes touchées par ce scandale d’espérer qu’une justice soit enfin rendue. Un soulagement pour Marine Martin :
« Savoir qu’il va y avoir un grand procès pour la Dépakine comme pour le Médiator est une grande satisfaction. Ils vont avoir à se justifier et j’espère qu’ils seront condamnés pour les dizaines de milliers d’enfants rendus handicapés, pour la tromperie des mères et pour ceux malheureusement décédés. »
Le groupe pharmaceutique estime que cette mise en examen permettra de révéler qu’il a « fait preuve de transparence et respecté son obligation d’information ».
à noter
Marine Martin est présidente de l’association APESAC (Aide aux Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anti-Convulsant). Pour plus d’informations : apesac.org