Dans la presse en 2022

Virginie et Grégory Monchy n'ont « toujours pas encaissé » l'affaire de la Dépakine

Le Télégramme

 

Ils ont appris en 2016 que leur fille Mathilde, 21 ans, est une « enfant ». Cinq ans plus tard, les Plouégatais Virginie et Grégory Monchy racontent le long chemin de l'indemnisation.

Comme en avril 2016, les Monchy nous reçoivent dans la salle à manger de leur plain-pied, à Plouégat-Guérand (29). Leur fille Mathilde est occupée « dans son domaine », un coin bureau donnant sur le jardin, spécialement aménagé pour elle depuis six ans. Casque sur les oreilles, la jeune femme visionne des vidéos de caméras embarquées, à bord d'un bus qui la fait circuler Outre-Atlan- tique. « C'est sa façon à elle de voyager. Elle n'aime pas du tout sortir, même dans le jardin », raconte son papa, Grégory.

Il y a six ans, Virginie et Grégory Monchy, 46 et 47 ans aujourd'hui, venaient à peine de rejoindre l'association des Parents d'Enfants souffrant du Syndrome de l'Anti-Convulsivant (Apesac). Ils attendaient un rendez-vous avec le Dr Journel, alors généticien au Centre hospitalier de Vannes, pour confirmer leur intuition. Les retards de développe- ment de Mathilde, ses difficultés d'apprentissage associés à de forts troubles du comportement, pouvaient-ils être liés à la   ? Épileptique, Virginie Monchy était sous traitement continu à cette molécule de valproate de sodium depuis déjà 14 ans, lorsque Mathilde est née, le 26 août 2000. Elle n'avait diminué les doses que de moitié pendant la grossesse, sans que son gynécologue ne la mette davantage en garde, à l'époque.

Mathilde a arrêté l'IME en 2019, car elle ne supportait plus la vie de groupe. Elle a beaucoup de mal avec l'extérieur et ne sort quasiment plus de la maison« Mathilde ne sort quasiment plus »

« Nous avons rencontré le Dr Journel en septembre 2016. Dès qu'il a vu les mains de Mathilde, il a été catégorique. Pour lui, elle était bien atteinte du syndrome d'embryofoetopathie au valproate de sodium. Ce qui en fait une enfant Dépakine », racontent les parents. Passé le soulagement de mettre un mot sur les maux et d'adhérer à un collectif, la famille a continué, comme elle pouvait, son chemin. La visite d'une équipe mo- bile d'intervention autisme (EMIA), en 2018 « a enfin clairement établi qu'on parlait d'autisme au sujet de Mathilde, se satisfait Virginie. Les conseils nous ont apporté des pistes pour mieux décoder ses attitudes ».

La famille Monchy le souligne. « Il y a eu des cas plus graves que Mathilde. Des enfants sont morts, d'autres ont de graves problèmes cardiaques ou rénaux, voire font eux-mêmes de l'épilepsie ». Chez la fille aînée des Monchy, en six ans, ce sont les troubles du comporte- ment qui ont malheureusement augmenté. « Mathilde a arrêté l'IME en 2019, car elle ne supportait plus la vie de groupe. Elle a beaucoup de mal avec l'extérieur et ne sort quasiment plus de la maison ».

L'argent ne nous rendra pas riche. Il n'enlèvera pas son autisme à Mathilde et ne lui rendra pas son autonomie.Leur dossier d'indemnisation « sur le haut de la pile »Pas question pour la jeune femme d'affronter, dans ces conditions, le regard des experts. « C'est le passage obligé pour s'engager dans la procédure pénale contre Sanofi. Il fallait aussi être capable de passer sur le gril en public, note Virginie Monchy. Nous avons choisi la procédure simplifiée, auprès de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Ça devait surtout être plus rapide », explique le couple.

Le dossier des Monchy est complet depuis mai 2019. Depuis, ils attendent, en espérant un règlement des indemnités « pourquoi pas avant 2023 ». Ils suivent bien entendu de près les avancées du dossier judiciaire « qui prendra peut-être encore des années. Mais puisque notre avocat a réussi pour le Médiator, on y croit ! »

Grégory, l'ancien chef de chantier, a changé de travail début 2021, moyen- nant une baisse de salaire de 25 %. « Mais je suis plus près de la maison et disponible pour soulager ma femme, qui passe tout son temps aux côtés de Mathilde ». Virginie, la maman Dépakine, n'en a pas fini avec la colère et le sentiment de culpabilité. « L'argent ne nous rendra pas riche. Il n'enlèvera pas son autisme à Mathilde et ne lui rendra pas son autonomie. Mais s'il peut la mettre à l'abri et la protéger lorsque nous ne serons plus là, ce ne sera pas si cher payé ».

Source : Le telegramme par Sophie Prevost